Pourquoi payer plus cher pour des produits de qualité ?

Sur les cartes des restaurants écoresponsables, les produits de qualité proposés donnent bien souvent lieu à des prix supérieurs à la moyenne. Alors que cette tarification semble justifiée pour les restaurateurs engagés, les clients ne perçoivent pas nécessairement la valeur ajoutée de la qualité et ne comprennent pas toujours les tarifs des plats. Pourquoi le bio, l’élevage extensif et la pêche responsable coûtent-ils plus cher ? Quels en sont les bénéfices ?

Pourquoi la qualité et l’éco responsabilité coûtent-elles plus cher ?

Par "qualité" d'un produit nous entendons la manière dont il est produit, son goût et ses qualités nutritionnelles. Toutes ces caractéristiques s’associent et s’influencent pour créer de bons produits. Nous nous sommes penchés sur trois vecteurs de qualité :

  • L’agriculture biologique ou agroécologique
  • L’élevage extensif
  • La pêche durable

→ Vous souhaitez sensibiliser votre clientèle et expliquer vos tarifs ? Retrouvez l'article "Faire comprendre ses prix et ses engagements dans sa communication" dans les Ressources d'Impact en vous abonnant.

Comprendre les prix des produits biologiques

Les produits biologiques, que l’on retrouve dans les magasins alimentaires ou dans la restauration, ont un coût généralement plus élevé que les produits dits “conventionnels” (en moyenne 35% plus chers d’après l’Association Familles Rurales). Cette différence de prix s’explique très facilement. 

L’agriculture biologique est un mode de production qui respecte différentes normes en adéquation avec la préservation de l’environnement. Cela entraîne diverses conséquences, notamment un rendement plus faible (en moyenne, des chercheurs néerlandais estiment qu’il est inférieur à 22%). Cette baisse de rendement s’explique principalement par la non-utilisation de pesticides, qui diminue le nombre de produits récoltés. De plus, l’agriculture biologique nécessite une main d'œuvre plus importante, “de longue durée et moins saisonnière” (Vincent Lestani, directeur de la CABSO). 

Les produits biologiques comme les légumes ou les fruits sont davantage soumis aux conditions et aux aléas climatiques, que ceux provenant d’une agriculture conventionnelle. Le volume produit étant plus faible, les prix augmentent automatiquement. 

Le contrôle et la certification pour acquérir un label biologique ont également un coût pour les professionnels (éleveurs, producteurs, restaurateurs, …). La certification européenne est gratuite en tant que telle, mais elle nécessite un contrôle par un organisme certificateur. Un contrôle peut valoir entre 450 et 1000 euros, et doit être fait annuellement. 

« Il y a des prix qui sont incompressibles. On ne peut pas faire quelque chose de bon, de qualité et de pas cher. Ce n’est pas possible. Non seulement il faut une révision de la Politique Agricole Commune (Pac) mais il faut un grand plan de transition pour que les éleveurs et les agriculteurs qui le souhaitent puissent effectuer la transition. »

Laure Ducos, Chargée de campagne Agriculture et Alimentation chez Greenpeace France, dans l'épisode "Spécial Ukraine" du podcast "Sur le Grill d'Écotable.

Le coût des viandes issues d'élevages extensifs et des poissons issus d'une pêche durable

Il en est de même pour l’élevage extensif que pour l'agriculture biologique : les différentes méthodes utilisées entraînent un moindre rendement. Le nombre d’animaux élevés diminue considérablement, ce qui augmente les prix. 

« Aujourd’hui les gens n’ont plus la valeur de ce que c’est une bonne viande. Comment elle est élevée, ce que mangent les bêtes… La bonne viande a un certain prix parce qu’il y a tout cela derrière. Ce n’est pas pour rien qu’au début du XXème siècle on mangeait de la viande une à deux fois par semaine. »

Clément Thollot de Pig’s daddy, boucherie en ligne qui fait du « crowdbutchering » avec des bêtes élevées en plein air, dont on respecte la croissance et nourries sans OGM ni engraisseurs.

→ Pig’s Daddy est à retrouver dans l’annuaire des fournisseurs d’Écotable sur Impact.

Dans le secteur de la pêche, la qualité est généralement assurée par la méthode de pêche utilisée. On distingue deux catégories: les engins actifs (drague et chalut de fond) et les engins passifs (casier, ligne de traîne, ligne à main). Ces derniers sont considérés comme les plus écoresponsables mais affichent un rendement plus faible: au lieu de miser sur une grande quantité pour une qualité moyenne, ces pêcheurs préfèrent une qualité supérieure pour une quantité plus faible. 

La taille des bateaux joue également un rôle important dans la qualité des produits: avec de plus petits bateaux, le débarquement se fait de manière journalière ce qui mène à une vente de poissons plus frais. En moyenne avec ce type de pêche, les poissons ne sont pas restés plus de 6 heures sur le pont ou dans la cale. A l'inverse, dans la pêche conventionnelle, les poissons sont stockés jusqu'à 10 jours.

→ Découvrez les différentes méthodes de pêches et leurs impacts dans les articles Quelles techniques de pêche choisir ?, Qu'est-ce que la pêche artisanale ? Comment la privilégier ?, Quel est le problème de la pêche minotière ?, Les impacts de l'aquaculture, de l'onglet Ressources sur Impact (accessible sur abonnement).

Un coût compensé par les effets positifs des produits de qualité

Le coût supplémentaire de produits d’une plus grande qualité peut également être vu comme un investissement personnel et environnemental. Lorsque l’on comprend et intègre les effets positifs de ces produits sur la santé et l’environnement, les tarifs pratiqués sont mieux compris. 

Les bienfaits sur la santé des produits biologiques, bien élevés et bien pêchés

Depuis plusieurs années, des études scientifiques montrent que l’alimentation biologique a un impact positif sur la santé des consommateurs. Dans une étude récente menée par l’Université de technologie de Chypre, l’influence de l’alimentation biologique sur la réduction des “marqueurs de stress oxydatif” (Le Monde) a été démontrée. Ces derniers influencent le développement de pathologies chroniques (certains types de cancers, diabète ou maladies neurodégénératives). L’absence de pesticides dans l’agriculture biologique est l’une des principales raisons pour expliquer ce meilleur état de santé. 

“Le médecin, c’est beaucoup plus cher que la farine” prononce Mauro Colagreco, chef du restaurant étoilé Le Mirazur, lors d’une interview, pour le média GQ, en mai 2020.  En préservant sa santé et en diminuant les risques de maladies, il est possible de limiter les diverses dépenses médicales et donc de compenser les prix plus élevés d’une meilleure alimentation. 

Avoir une alimentation écoresponsable signifie respecter la saisonnalité des produits. Or, il existe une corrélation entre les produits de saison et les besoins nutritifs nécessaires à chaque individu. En hiver, les fruits et légumes sont riches en minéraux et en nutriments, et les agrumes sont riches en vitamines C. En été, les fruits et les légumes de saison sont plus riches en eau.

Du point de vue de l'environnement : les bienfaits des produits biologiques, bien élevés, bien pêchés

Les bienfaits de l’agriculture biologique

L’agriculture biologique, en plus de produire des aliments bons pour la santé, a des conséquences positives sur l’environnement. 

D’abord, l’absence de pesticides permet de préserver l’environnement et de diminuer la pollution, en comparaison avec une agriculture conventionnelle. 

Ce type d’agriculture permet une préservation des sols (mais également un enrichissement de ceux-ci) et des nappes phréatiques. En étant moins polluante, elle permet également une économie dans le coût des processus de potabilisation de l’eau. 

Néanmoins, l’agriculture biologique n’est pas synonyme de saisonnalité. Il est donc préférable de combiner les deux. En effet, respecter les saisons est aussi bénéfique pour l’environnement. La production hors-saison a des conséquences environnementales négatives : 

  • Distribution: notamment avec l’importation par voie maritime, aérienne ou terrestre. 
  • Un transport plus long nécessite généralement l’utilisation de camions frigorifiques, qui requièrent, pour conserver le froid, des hydrofluorocarbures (HFC), participant au réchauffement climatique.
  • Produits chimiques: nécessaires à la conservation longue durée.

« On va devoir payer un jour le vrai prix de l’agriculture conventionnelle et ce sera considérable »

Claude Gruffat, député européen pour Europe Écologie Les Verts, dans l’épisode 19 du podcast Sur le Grill d’Écotable.

→ Où trouver des produits de qualité ? Écotable met à votre disposition un annuaire de prestataires engagés sur Impact par Écotable (accessible sur abonnement).

La préservation environnementale de la pêche durable

La pêche avec des engins actifs a un impact considérable sur les fonds marins et sa faune. Par exemple, les chaluts de fond raclent les fonds marins pour attraper des poissons, or cela endommage fortement les écosystèmes marins. Les méthodes de pêche plus durables, avec des engins passifs, permettent une meilleure préservation. De plus, des techniques comme la pêche au casier ou à la ligne permettent de sélectionner des espèces précises et de relâcher vivantes les espèces sur-consommées ou les poissons trop petits.

La viande durable : une solution pour éviter les dégâts environnementaux de l'élevage intensif

Privilégier l’élevage extensif plutôt que l’élevage intensif engendre des coûts supplémentaires, mais l’amélioration de l’impact environnemental est inégalable. 

Les chiffres de l’élevage intensif sont alarmants : 

  • 14% des émissions de gaz à effet de serre (méthane, protoxyde d’azote et dioxyde de carbone) sont dues à l’élevage; 
  • En moyenne, 8000 litres d’eau sont nécessaires pour 1 kilo de protéines carnées ; 
  • 64% de la déforestation en Amazonie est liée à l’élevage; 
  • 400 zones mortes (zone marine privée d'oxygène), réparties sur 245 000 km2 d’océans, existent à cause du des engrais agricoles. 

Graphique représentant le taux d’oxygénation des océans à 100 mètres de profondeur. Source: National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA)

Un passage à l’élevage extensif, qui valorise les ressources disponibles et limite la densité d’animaux, réduit les émissions de gaz à effet de serre, diminue l’usage d’antibiotiques, la pollution et la surconsommation de l’eau.

Un cercle vertueux pour les producteurs, les éleveurs et les pêcheurs

Pour trouver des aliments de qualité, il est nécessaire de passer par des producteurs sensibles à cette même qualité et privilégiant des pratiques à faible impact environnemental. Ce changement permet une revalorisation du travail des agriculteurs, mais aussi des territoires et des produits. 

« Il y a des préoccupations environnementales, mais ce sont aussi des préoccupations sociales et économiques. Les agriculteurs et agricultrices n’ont jamais autant souffert qu’aujourd’hui »

Jean-François Julliard, Directeur Général de Greenpeace France, dans l’épisode “Personnalité #4” du podcast Sur le Grill d’Écotable.

En passant par des fournisseurs écoresponsables, il est également possible de se tourner vers des circuits courts, plus respectueux de l’environnement, qui sont plus économiques: sans structures intermédiaires, les bénéfices vont aux restaurateurs et aux producteurs. 

Dans le monde de la pêche, il est indéniable qu’une pêche durable, avec des bateaux plus petits, a des conséquences sociales positives pour les marins. Ainsi, les débarquements journaliers permettent aux pêcheurs d’avoir une meilleure qualité de vie (dormir chez eux chaque jour, éviter la prise de substances illicites pour supporter la charge du travail, etc.). 

La variabilité des prises de poissons et de leur prix peut également être un inconvénient pour les pêcheurs. Des entreprises prennent le sujet à bras le corps et tentent de trouver des solutions. Poiscaille, par exemple, met en place une grille de prix fixes, afin de sécuriser l’emploi des pêcheurs. Cette grille permet également de mettre en avant des espèces mal valorisées en les achetant à un prix supérieur.

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