« Ne nourrissez pas les poubelles », le cheval de bataille de la cheffe Chloé Charles
Marraine d’Écotable, la cheffe indépendante Chloé Charles a été un précieux soutien depuis le lancement du projet en janvier 2019. Particulièrement sensible à la question du gaspillage alimentaire, elle a fait de la cuisine anti-gaspi et écoresponsable sa marque de fabrique. Récemment médiatisée par un passage dans l’émission Top Chef 2021, Chloé Charles n’a pour autant pas abonné un projet qui lui est cher, et qu’elle partage depuis plusieurs années avec son associé Sébastien Robin : Reductio. Son objectif ? Aider les cuisiniers à identifier et réduire leurs pertes, afin d’éviter de nourrir les poubelles, et de réaliser des économies dans le même temps. Rencontre avec celle qui fait rimer économie et écologie en cuisine.
Comment expliques-tu ton engagement vis-à-vis de la réduction des déchets alimentaires ? Y-a-t’il eu un élément déclencheur dans ton parcours ?
J’ai appris à cuisiner de cette manière lorsque j’avais 17 ans. Cela ne m’a pas quitté et aujourd’hui c’est tellement une évidence pour moi que j’ai du mal à comprendre comment on peut cuisiner autrement.
Pour toi la réduction des pertes et du gaspillage alimentaire est à la base du métier de cuisinier. Comment expliquer que cette notion se soit perdue au fil du temps ?
L’accès à des matières premières à profusion, dû à l’industrialisation de l’alimentation, à bas coût fait qu’on a désacralisé la nourriture, et que l’on a voulu ne manger que la meilleure partie de chaque produit. Nous nous sommes payé ce luxe quelques dizaines d’années, nous allons le payer assez cher je pense. Le retour au bon sens est indispensable.
On aurait tendance à penser que valoriser l’intégralité des produits prend plus de temps. Est-ce une idée reçue ?
Travailler avec des produits bruts et des bêtes entières prend plus de temps qu’avec du semi préparé, c'est une certitude. Mais une fois qu’on en est à acheter des produits bruts, non ça ne prend pas vraiment plus de temps.
Quel est ton objectif avec ce nouveau projet qu’est Reductio ?
Il existe un objectif national de réduction du gaspillage alimentaire de 50% pour la restauration collective en 2025 (2030 pour la restauration traditionnelle). Nous nous inscrivons dans cette trajectoire mon associé et moi. Les restaurants ont besoin d'un accompagnement externe car contrairement à ce que l'on pourrait penser, ce n'est pas si évident que cela. Par où commencer ? Quelles sont les priorités ? Comment les mettre en place ?
Par exemple en ce moment, nous travaillons avec la restauration collective et l’heure n’est pas à cuisiner les verts de poireaux... C’est un autre métier que le mien, on ne produit pas 16000 couverts comme une cinquantaine. Mon objectif c’est de montrer aux restaurants que l’on accompagne que collectivement on peut arriver à de beaux résultats rapidement. Mon œil professionnel en cuisine et celui de mon associé Sébastien en gestion font de nous un très bon binôme. Notre grande force ? Rassembler les équipes vers un objectif commun. Nous pointons souvent du doigt nos voisins comme responsables du gaspillage mais la réalité c’est que chaque acteur, de l’administration au consommateur, a son rôle à jouer.
Enfin, as-tu un conseil, une bonne pratique, un réflexe ou même une idée de recette à partager aux restaurateurs qui nous lisent ?
La première chose à faire est de décréter que la lutte contre le gaspillage est une priorité au sein de son entreprise et d’en faire un objectif commun et positif ! Ensuite, il faut se poser les bonnes questions : De quoi parle-t-on ? Quels sont les volumes concernés ? Quels sont mes points forts et ceux à améliorer ? Enfin, je conseillerais de passer à l'action et de se faire confiance. Au pire, ça ne marche pas et alors ?
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