Comprendre le Planet-Score avec Sabine Bonnot, Porte-parole du dispositif
Sabine Bonnot est Présidente de l’Institut Technique de l’Agriculture Biologique (ITAB) depuis 2021, en plus d’être la Porte-Parole du dispositif d’affichage environnemental Planet-Score. Elle revient pour nous sur la naissance du Planet-Score, ses fondements scientifiques et son actualité.
Pouvez-vous vous présenter et détailler la mission de l’ITAB ?
Je suis Sabine Bonnot, Présidente de l’ITAB, un institut technique agréé par le Ministère de l’Agriculture. Il s’agit d’un institut associatif qui existe depuis une quarantaine d’années et qui est reconnu d’intérêt général. La mission de l’ITAB est d’accompagner la transition écologique de l’agriculture et de l’alimentation. Dans ce cadre-là, il mène des travaux d’évaluation environnementale des différents types de systèmes de production. Et c’est dans ce cadre, que des travaux ont été menés pour la conception d’un outil d’affichage environnemental, le Planet-Score. D’ailleurs, cet outil n’est plus entre les mains de l’institut aujourd’hui, puisque la gouvernance de l’ITAB vient de le céder à la société civile, ce que signifie que la marque Planet-Score va être donnée à une structure d’intérêt général non lucrative, gouvernée uniquement par des associations d’environnement et de consommateurs, qui seront garantes de l’utilisation de la marque par une entreprise à mission qui en assure le déploiement. Ce schéma permet de garantir l’indépendance et l’exigence du dispositif Planet-Score dans le long terme.
Qu’est-ce que le Planet-Score exactement ?
Le Planet-Score est un outil d’information, à la fois pour les consommateurs, les relations entre entreprises, et pour les restaurateurs, sur la valeur environnementale des produits alimentaires. Et donc c’est un outil qui regarde tous les enjeux, à la fois les enjeux liés à la nature et à la biodiversité, au climat, mais également les enjeux liés au système d’élevage.
Le Planet-Score prend notamment en compte tous les enjeux liés au bien-être des animaux de ferme, qui sont des enjeux-clés sur les systèmes de production alimentaire aujourd’hui. On est dans des schémas, où on produit beaucoup et notamment beaucoup de « productions animales » - et j’utilise ce terme à dessein, car dans certains cas ce n’est plus de l’élevage. Aujourd’hui, ce système de production et de consommation n’est pas soutenable, car on consomme beaucoup trop de surfaces pour manger comme on le fait, et notamment à cause de la surconsommation de produits issus de l’élevage.
Des prospectives comme celle de l’IDDRI, Ten Years for Agroecology in Europe, ou celle du CNRS, qui a été publiée en 2021, montrent qu’il est possible d’avoir une agriculture et une alimentation réellement soutenables à l’échelle européenne et internationale. Le Planet-Score est, en fait, une boussole qui montre comment aller dans cette direction-là, avec de la nuance, et qui donne des trajectoires de progrès à tous les produits qui sont aujourd’hui sur le marché. Beaucoup ont pas mal de progrès à faire, certains sont déjà assez aboutis dans leur démarche, mais c’est globalement un outil qui va permettre de faire le distingo entre des entreprises et des producteurs qui ont déjà beaucoup bougé, et puis ceux pour qui il est important de se mettre en chemin, dès aujourd’hui.
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Dans quel contexte est né le Planet-Score ? A-t-il été créé en réaction à l’Eco-Score ?
Le Planet-Score n’est pas né en réaction à l'Eco-Score (qui n’était pas encore lancé), il est né en réaction à des bases de données publiques françaises, Agribalyse, et européennes, qui sont des bases de donnés d’analyse du cycle de vie (ACV). Ces dernières ne sont absolument pas soutenues par la société civile, les associations de consommateurs à l’échelle européenne, les ONGs d’environnement, les collectifs étudiants, ni par un certain nombre d'industriels engagés, car elles produisent des résultats totalement inverses de la transition. Certains lobbies industriels, par contre, sont très favorables à ces métriques-là, parce qu’elles évitent de regarder la transition en face et de s’y engager réellement.
« Le Planet-Score est un outil d’information, à la fois pour les consommateurs, les relations entre entreprises, et pour les restaurateurs, sur la valeur environnementale des produits alimentaires. »
Sabine Bonnot, Porte-parole du dispositif Planet-Score, au micro de Sur le grill d'Écotable
Selon nous, si la régulation c’est d’imposer ce type d’outils, c’est qu’on est en train de prendre le chemin inverse de celui de la transition. Et cela est extrêmement bien renseigné par tout un tas de travaux scientifiques. Pour l’agroalimentaire, c’est donc extrêmement préoccupant, mais ça l’est aussi pour le textile. Ce sont deux secteurs pour lesquels ces métriques ne marchent pas, et où la régulation tenterait probablement de les imposer. C’est en tout cas ce vers quoi on semble s’orienter aujourd’hui.
Donc, pour nous, ce n’est pas seulement une réaction à ces outils, c’est se mettre en ordre de marche pour créer des outils pertinents afin de refléter réellement les enjeux environnementaux. Et c’est tout à fait possible, on l’a d’ailleurs prouvé avec le Planet-Score.
Sur quelles données vous êtes-vous appuyés pour créer le Planet-Score ?
Puisque c’était un peu un parcours imposé (ou en tous cas fortement recommandé par les pouvoirs publics), nous avons dans un premier temps essayé d’utiliser les bases de données d’analyse de cycle de vie pour une petite partie du référentiel. On l’a fait pour refléter - et là c’est scientifiquement consensuel ce que je vous dis-là - les questions d’efficience ; mais quand on parle d’efficience, on n’est pas en train de parler d’environnement.
Le reste du référentiel est calé sur les limites planétaires, donc ça c’est un cadre conceptuel scientifique international, un petit peu l’équivalent du GIEC sur les limites planétaires. En fait, on regarde sur chacune de ces limites quelle est la contribution de l’agroalimentaire, et elle est souvent très élevée, notamment sur les pollutions chimiques, la biodiversité, la gestion de l’eau, les cycles de l’azote et du phosphore. Et en fonction du degré d’implication de l’agroalimentaire dans ces limites planétaires, on met des pondérations qui reflètent la nécessité pour le secteur d’agir sur ces critères-là. Il s’agit de la méthode dite « d’unité de charge écologique », qui s’adapte en fonction de l’atteinte ou non des objectifs et de la cohérence des politiques publiques environnementales avec ces objectifs.
→ Pour en apprendre plus, écoutez l'épisode « #84 - La notation des produits alimentaires » de Sur le grill d'Écotable ! Sabine Bonnot y parle de la fonction des dispositifs d’affichage environnementaux et nutritionnels, de la perception des consommateurs et d’éducation à l’alimentation.
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